L’initiation Maçonnique est une Voie initiatique traditionnelle qui fait appel à un rituel, une règle, et un ensemble de symboles.

Le sens de l’assiduité

Toutes les traditions et méthodes initiatiques exigent de leurs adeptes, d’une façon ou d’une autre, et à un moment ou un autre, qu’ils fassent preuve d’assiduité: pourquoi ? Nous explorons dans cette planche le concept d’assiduité et tentons de mieux comprendre son sens, son rôle et son influence dans le parcours initiatique.

L’assiduité en Loge est au même titre que l’acquittement de sa capitation, un devoir. Ces devoirs font l’objet de questions précises posées au profane avant son initiation, et d’un serment. Au GODF par exemple, avant même son initiation, le profane signe sur une feuille bleue son contrat avec l’Ordre, qui inclut deux engagements formels: celui d’assiduité, et celui de contribuer par sa capitation aux besoins de sa loge. Dans le rituel du REAA dit de 1802 (pratiqué à la GLNF), le point numéro 8 de la règle en 12 points – lue au profane – rappelle que Les Francs-Maçons s’assemblent, hors du monde profane, dans des loges [1] pour y travailler selon le rite, avec zèle et assiduité […]2.

Et d’ailleurs, contrairement à de nombreux usages qui ne font pas l’objet d’articles de règlement – comme par exemple l’organisation des ateliers de formation des Compagnons et Apprentis ou encore la préparation des agapes, l’assiduité – pour ce qui la concerne – est codifiée dans tous les règlements généraux de toutes les obédiences, sans exception : au DH, par exemple, des articles – très précis – la définissent:

(Art 15 OMI) Sont membres actifs les francs-maçons assidus dans leurs ateliers d’appartenance et en règle avec leurs obligations financières.

Un membre qui ne serait pas actif – donc non assidu – encourrait la radiation et ne saurait être éligible à un office. Il ne peut non plus voter. Dans certains règlements, le passage de grade est expressément proscrit en cas de défaut d’assiduité (Art 90 GODF). Et si parfois les règlements modifiés ne caractérisent plus ce qu’est un membre actif, d’autres le font ou l’ont fait: assister aux 2/3 des tenues (tout en s’étant dûment fait excuser pour les autres) semblait être le minimum dans la défunte Fédération du Droit Humain du Canada (article 24.2).

Hors de ces quelques cas de définition précise de ce qu’est l’assiduité, de manière générale, la Franc Maçonnerie conçoit l’assiduité comme une obligation de présence totale aux tenues, ponctuée d’absences dûment excusées et justifiées par une impérieuse obligation.

Cette insistance sur le caractère obligatoire de l’assiduité n’est pas neuve. Le Régulateur (rituels ancêtre du Rite Français du GODF de la fin du XVIII ème siècle) mentionne l’exigence d’une constance à toute épreuve3, explicite allusion à l’assiduité. Dès 1778 le RER formule la même exigence4 . Et les effets délétères du manque de respect de la promesse et de sa sincérité sont mentionnés très clairement dans la plupart des rituels d’initiation au premier degré. Ainsi, lors du passage de la coupe d’amertume : au REAA, on mentionne que si la fausseté et la dissimulation accompagnent votre promesse, ne jurez pas… Éloignez plutôt cette coupe et craignez l’effet prompt et terrible de ce breuvage5.

Phénomène surprenant, cette injonction d’assiduité, omniprésente dans les étapes de nos parcours initiatiques, est quasiment absente de la littérature maçonnique (surprenant car les Maçons – adeptes du secret – écrivent d’habitude beaucoup ) ! Le dictionnaire symbolique Boucher – pourtant si disert sur tous les sujets – dans son index entre ARTHIRSTATA et ATERSATHA ne nous dit rien de l’ASsiduité !

Plus moderne, sur l’Édifice, source intarissable de planches sur le pavé mosaïque, l’équerre, le compas, le soleil ou la lune, je n’ai trouvé – avec difficulté – que deux planches dont il ressort en résumé qu’il faut être assidu […] par ce que c’est important d’être assidu6. Plus ancien : une planche sur le sujet est parue en 1924 dans la revue Symbolisme du F:. Wirth mais qui, là encore, nous éclaire assez peu7: on y lit que l’assiduité serait essentielle à la construction et l’entretient de la fraternité, ce qui est assurément vrai, mais nous laisse sur notre faim.

Arrivé ici, s’explique pourquoi la question de l’assiduité me semble si intéressante : elle pose une double énigme (et les Maçons devraient tous aimer les énigmes).

  • Première énigme, pourquoi dans la plupart des ateliers, alors que l’assiduité est d’emblée mentionnée comme impérative, se plaint on inexorablement, à un moment ou un autre, de l’absentéisme de F:. et de S:. ?
  • Seconde énigme : pourquoi – si l’assiduité est si importante – dispose t-on de si peut de réflexions sur le sujet ? Ce qui revient à ne jamais expliquer pourquoi ils devraient être présents à ceux qui sont absents. Admettons ici que quelques arguments ne seraient pas de trop pour parvenir à les convaincre et les encourager.

Hypothèse que je vous propose d’explorer : et si l’assiduité se trouvait être un élément central de l’initiation Maçonnique, l’une de ses grandes clés, l’un de ses grands secrets. Quelque chose de plus que par ce que quand on est assidu, on fournit un minimum de travail initiatique, même sans en avoir l’intention8.

Assiduité dans les autres traditions initiatiques

Pour tenter de dissiper ce mystère, commençons par chercher ailleurs. Car l’engagement d’assiduité n’est pas l’apanage unique de la F :.M :.. En cherchant peu, on trouve rapidement la trace de cet engagement dans la plupart des traditions initiatiques.

Le fondateur du karaté moderne, Gichin Funakoshi, qui lui même avait été initié à un Karaté Traditionnel Okinawaien (donc initiatique) auprès d’Ankô Itosu, avait transmis au Japon 20 préceptes – les Kyokun – dont l’un est particulièrement intéressant : ‘Pareil à l’eau en ébullition, le karaté perd son ardeur s’il n’est pas entretenu par une flamme’9. Il ne fait aucun doute que ce précepte fait référence à l’assiduité dans la pratique, et aux effets particuliers qu’un initié pourra ressentir si il est assidu: Itosu indiquant dans Tode Jukun que [seul] celui qui s’entraîne chaque jour avec assiduité pendant 3 à 4 années arrivera à comprendre le karaté. J’ai le souvenir d’un Maître de Karaté demandant à un jeune élève qui avait manqué son entraînement pour cause d’inondations (particulièrement brutales dans le sud de la France), si il savait ou non nager : la question de l’assiduité dans certains groupes d’arts martiaux traditionnels n’est certainement pas anodine.

Le soufisme, autre tradition initiatique majeure, et qui séduisit et séduit encore de nombreux F :. et S :. souligne aussi les vertus essentielles de l’assiduité : Ce sera bien plutôt par l’assiduité dans la fréquentation du cheikh, dans les services (hidma) que l’on est prêt à rendre, que l’on pourra distinguer le murıd, le disciple, du muhøibb, le simple dévot du cheikh à la recherche de son influx spirituel10 (qu’on appelle la baraka11, qui signifie avoir de la chance, être béni mais aussi désigne l’influence spirituelle transmise lors des rites initiatiques Soufi)12.

Ainsi, pour de nombreuses traditions, Zen, Bouddhisme13, l’assiduité dans la pratique est mentionnée comme une condition nécessaire à la compréhension de la voie.

Quelles explications pourraient être données à la référence permanente à l’assiduité dans tant de traditions initiatiques, de natures très différentes et nées sur plusieurs continents ?

Comme nous le dit Sophie Perenne, ancienne membre de la commission des rituels de l’atelier Condorcet au Droit Humain14 dans son ouvrage sur le rite: [c]hez le maçon, le souvenir des sensations et des émotions vécues, qui perdurent et se renouvellent chaque fois qu’il assiste à une initiation, laisse en lui comme une scarification intérieure, une empreinte inaltérable. Et d’ajouter que [l]a spécificité des rites maçonniques est qu’ils s’inscrivent dans une voie initiatique qui est un processus de transformation. […] qu’ils s’adressent avant tout au corps, à l’émotion et à l’intuition.

Hors pour ressentir l’émotion et l’intuition, il faut être physiquement présent. C’est l’une des justifications plausibles de l’exigence d’assiduité. Car si tel n’était pas le cas, – c’est encore l’autrice qui l’écrit – il suffirait de faire une conférence expliquant la nécessité de se transformer et tout le monde serait sage.

Le rôle social du rituel et sa relation à l’assiduité

Poursuivons notre réflexion sur cette question de la pratique du rituel et la notion même de rite. Sartre nous dit que quand beaucoup d’hommes sont ensembles, il faut les séparer par des rites, ou bien ils se massacrent.

Il est proposé que dans toute l’humanité, les rites ont donc pour première fonction de ‘mettre de l’ordre’ […], de l’harmonie dans le chaos. Le plus souvent, les rites ont un rôle social. En inhibant les pulsions agressives, en apprivoisant la peur de l’autre, en diminuant l’ambiguïté des signes, en organisant les relations interpersonnelles, ils jouent un rôle Darwinien dans la cohésion et la survie du groupe : règles de savoir vivre, d’hospitalité, de préséance, rituels d’alliance, pacification. Mais ils répondent aussi au besoin individuel de sécurité en atténuant l’angoisse devant le changement, en octroyant un sens à la condition naturelle, en reliant l’individu à la communauté, celle ci à son passé, à son futur, et en rattachant l’homme à ce qui le dépasse, qu’il s’agisse des forces de la nature ou d’une divinité15, mais aussi à la simple question du sens de la vie au quotidien.

La pratique assidue du rituel apaiserait donc l’Humain, lui permettrait d’affronter la vie plus sereinement.

La plupart des maçons reconnaissent que le rituel d’ouverture a sur eux un effet apaisant, qu’il les délivre des tensions voire de la fatigue liée à leur journée et à leur vie profanes. Comment cet effet est-il obtenu ? S’il est impossible de vider son esprit, on peut néanmoins le tranquilliser. Depuis son origine, l’humanité connaît la vertu de certaines techniques ayant un effet psychotrope modifiant l’état de conscience. Parmi celles-ci, la répétition occupe une place de choix, qu’elle soit sonore ou verbale. On pourrait ranger dans ces répétitions des phrases clés telles que ‘à l’ordre’, des postures physiques inhabituelles ou encore des percussion de maillet à répétition.

Ce pourrait être un autre des secrets de l’assiduité maçonnique: son impact sur l’hygiène mentale du maçon. Lequel d’entre nous, déclinant pour une mauvaise raison son devoir de se rendre à une tenue (dite d’obligation, nom qui n’est pas choisi par hasard) n’a pas ressenti de la culpabilité, sorte d’effet opposé de la sensation de bien être et de relaxation ressentie lorsque, qu’il pleuve, qu’il vente, ou qu’il neige, nous nous sommes fait violence pour nous joindre à nos F:. et S:., victorieux sur notre nonchalance?

Se pourrait-t-il que notre psyché nous récompense ou nous punisse selon que nous respections notre serment d’assiduité ou non ?

  • Face blanche, Yang, atténuation de l’angoisse existentielle par le respect de notre engagement d’assiduité envers la loge et la réception des bienfaits de son rituel.
  • Face noire, Yin, l’angoisse, la culpabilité, ou les deux, provoquée par le manquement à notre engagement, privant notre psychisme pendant une période plus ou moins longue des effets bénéfiques de la tenue.

Le pavé mosaïque n’est pas très loin. Le signe d’App :. non plus : si tu violes ton serment nous dit le rituel, ta tête sera séparée de ton corps, en tranchant ta gorge. Symbole explicite qui pourrait nous suggérer par une métaphore que faute de cette assiduité – à laquelle tu t’es engagé – tu te priveras des effets régulateurs et apaisants du rituel, et t’en trouvera exposé aux tourments psychologiques qui peuvent découler de cette privation.

Le rituel agissant

Cette hypothèse du rituel agissant directement sur la psyché et le bien être individuel n’est pas anodine, et même largement soutenue par les dernières avancées de la recherche neurologique.

Les travaux du docteur Naccache – Neurologue à la Pitié-Salpétrière – montrent que les chemins de la pensée et de la mémoire sont bien plus divers que ne le croient ceux qui s’en tiennent au seul pouvoir de la raison. Des gestes répétés, des perceptions de tous ordres, conscientes ou inconscientes, impriment dans nos cerveaux des marques durables, qui ont de grands effets sur nos pensées et nos comportements. Ces découvertes jettent une lumière nouvelle sur le pouvoir des rites, si présents mais si mal compris dans la vie des organisations.16

Des centaines d’initiés peuvent attester des transformations que produit l’assiduité sans nécessairement être en mesure de les expliquer, et c’est peut être d’ailleurs l’un des aspect du secret Maçonnique.

Que se passe-t-il […] dans notre corps-esprit lors d’une pratique rituelle? Plus ou moins la même chose que dans la méditation bouddhique. Notre état de vigilance quotidienne s’estompant, il se produit dans notre cerveau des réactions en cascade qui ont été observées par imagerie à résonance magnétique. Le lobe pariétal droit qui traite les informations sur l’espace et le temps se désafférente (autrement dit ne reçoit plus de messages entrants), ce qui entraîne un sentiment d’infini et d’éternité.

Puis l’hypothalamus qui contrôle le cœur et les poumons est stimulé, ce qui a pour effet de ralentir les rythmes cardiaque et respiratoire. Enfin c’est le lobe gauche, siège de la conscience d’un moi séparé du monde, qui se désafférente. Le cerveau produit alors des endorphines, molécules du plaisir et de l’extase, sorte de morphine naturelle qui a pour effet de diminuer le stress, d’engendrer le bien-être, de déclencher le rêve éveillé, de réduire les pulsions agressives et d’accentuer la tendance affective17. On est proche ici de certains effets ressentis en loge, en particulier pendant une initiation.

On pourrait imaginer une expérience, après tout, une tenue est en quelque sorte un laboratoire d’expérimentation, dans laquelle on mesurerait les rythmes cardiaques de tous les présents, avant, pendant, et après. Il ne serait pas surprenant que ce rythme forme une courbe en U, parfaitement observable.

Le rituel met donc en veilleuse notre cerveau gauche dualiste, analytique, agité, au profit du droit caractérisé par sa capacité d’intuition, d’imagination, de rêve, d’association libre. Il nous ouvre au symbolisme et nous prépare à aborder un morceau d’architecture avec un esprit pacifié, car l’être humain aborde mieux l’inconnu s’il dispose d’une base de sécurité. Enfin il produit un sentiment d’appartenance au groupe et il engendre l’égrégore. Nous ne sommes plus une addition d’individus, mais un groupe qui recrée son identité en partageant les mêmes contenus psychiques18.

La théorie bayésienne de la cognition décortique comment des stimuli imprévus peuvent remettre en cause nos croyances, et ainsi nous transformer.

Par exemple, si je découvre un cobra dans mon appartement, mes croyances concernant le danger dans mon environnement immédiat (sécurité de l’environnement, absence d’animaux dangereux, absence de risque vital immédiat) vont immédiatement se mettre à jour, parallèlement à une augmentation imprévue de mon rythme cardiaque et à une contraction non programmée de ma musculature. Au fil des inférences bayésiennes, les erreurs de prédiction vont remonter le long de la hiérarchie corticale et permettre au cortex de mettre à jour les prédictions antérieures.19

Remplaçons maintenant ce cobra – peut probable sous nos latitudes – par une répétition de chocs et de surprises, plus ou moins intenses, vécus les yeux bandés. Mettons les aussi en perspective avec la succession d’ouverture et de fermeture de travaux dans un contexte déconnecté de notre quotidien et de nos routines – ‘nous ne sommes plus dans le monde profane‘. L’irruption de mots, de bruits, d’anachronismes, le spectacle des symboles, sont autant de chocs et de remise en question de nos convictions : tout de ce que nous faisons, disons et vivons en loge est bien trop non-conventionnel pour être montré et accepté par un public profane; et là est le véritable moteur de notre transformation. Comment ce moteur pourrait il fonctionner, privé du carburant qu’est la présence dans une tenue, physiquement, réellement ? Ajoutons que plus une activité est automatisée (c’est le cas de la répétition du rituel), plus elle échappe à la conscience et plus elle doit impliquer le ressenti par le vécu, plutôt que la réflexion raisonnée.

Un matérialiste convaincu (et il en existe aussi dans la Franc Maçonnerie) pourrait objecter que ce caractère agissant du rituel est une fable, que quelques coups de maillet, des lumières tamisées et deux ou trois symboles assemblés par une société secrète (ou discrète) ne sauraient produire de si grands effets sur la psychologie humaine.

Ce serait oublier que le rituel tel qu’il nous est parvenu, probablement assemblé au début du XVIII ème siècle, n’est pas une création ex-nihilo. Notre rituel s’appuie sur d’autres rituels, d’autres pratiques connues (comme l’alchimie qui considère l’assiduité devant les fourneaux comme essentielle à la finalisation du Grand Œuvre) et documentées dès la fin du XVI ème siècle. Certains de leurs aspects psychologiques les plus étonnants sont évoqués dès cette époque (comme par exemple la maîtrise de l’art de la mémoire mentionné comme impérative pour l’apprenti dans les statuts de Shaw). Et si les origines des rites maçonniques s’estompent dans les brumes de la société pré-imprimerie, il n’en demeure pas moins qu’une tradition initiatique très ancienne a existé.

A vrai dire, avant même que Euclide, Platon, ou Aristote, ne s’intéressent à travers la philosophie et la science à la psychologie des profondeurs, des rituels susceptibles d’initier et de transformer des individus on existé : les mains et les symboles dessinées sur les grottes du néolithique en attestent.

Il ne serait donc pas surprenant que bien avant Freud, Jung, la neuropsychiatrie et l’étude du cerveau par des moyens technologiques modernes, des hommes aient su assembler, reconstruire, et transmettre des rituels agissants, par leur pratique assidue, sur la psyché des êtres humains, et que le REAA soit le descendant de ses rituels.

Et pour conclure sur ce point, il n’est pas très difficile – a minima – à défaut de le prouver aux autres, de se le prouver à soi même: il suffit d’essayer, d’être assidu en tenue, d’écouter ses sensations, de chercher à les comprendre, d’observer les transformations que la pratique assidue du rituel maçonnique produit sur notre psyché, nos vies, nos actions dans la société, notre prospérité. Ou d’observer à l’inverse ce que les tenues manquées par ce qu’on est fatiguée, qu’il y a a un match à la télé, ou simplement par ce qu’on est pas motivé, produisent comme insatisfaction ou sentiment de culpabilité, et conséquences néfastes dans notre quotidien.

Conclusion

L’assiduité serait donc – au-delà de son caractère réglementaire de surface – un élément fondamental de la démarche initiatique, un des secrets de la transformation procuré par le rituel pratiqué régulièrement et assidûment, un puissant levier d’influence sur la vie, la santé, et le bien être de l’initié.

Mais l’assiduité n’offrirait pas ses bienfaits qu’au Maçon. L’assiduité qui agit par le prisme démultiplicateur du rituel, s’exerce sur trois niveaux successifs :

  • d’abord sur le premier niveau celui de l’initié  qui par sa présence, son engagement, le bonheur de contribuer au travail commun, fait naître la beauté et apporte l’harmonie;
  • au second niveau, celui du collectif des F :. et des S :. qui par l’intensité du sentiment fraternel, rayonne d’énergie et déploie sa force.
  • au troisième niveau, c’est la loge dans son entier qui transforme la force en lumière plus ou moins intense. De là vient la vitalité de l’Égrégore nourri par la sagesse de l’atelier.

Conséquence, par un effet inverse, manquer à son serment d’assiduité n’a pas que des effets sur soi : il affecte également la fraternité initiatique, ainsi que ce qu’elle engendre, l’organisme vivant qu’est la loge, et son esprit, l’Égrégore, dont l’intensité lentement s’épuise, et les bienfaits s’amenuisent.

Quelle F:. ou S:. avec un peu d’ancienneté n’a observé au moins une fois dans sa vie de Maçon une loge, épuisée par son absentéisme, mourante de ses colonnes vides, à peine capable d’ouvrir faute du nombre de F:. Maîtres rituellement requis, et dont les officiers désespérés perdent de vue le sens de la démarche.

Pratiqués collectivement, [les rituels] procurent un sentiment d’appartenance commune au-delà des différences. J’ajouterais, particulièrement lorsqu’ils sont parfumés des effluves du secret, qui souligne encore plus cet aspect d’appartenance. Le rituel maçonnique est en premier lieu un secret de famille qui ne dit pas son nom. Un secret positif qui soude une communauté de vie par une pratique décalée et immontrable dans la vie de tous les jours, mais qui doit être assidue pour produire son plein effet.

En d’autre terme, il n’existe de Maçons, de fraternité Maçonnique, d’Égrégore qu’avec une assiduité réelle, accompagnée d’une pratique rigoureuse du rituel.

J’ai dit !

Grégoire Arroyal

Références

1 [où sont toujours exposées les trois Grandes Lumières de l’Ordre : un Volume de la loi Sacrée, une Équerre et un Compas]

2 REAA Apprenti 1802

3 Le Régulateur du Maçon – Pierre Mollier

4 En 1778, le Convent des Gaules, sous l’impulsion de Jean Baptiste Willermoz définit le Régime Écossais Rectifié qui expressément, souligne la caractère impératif de l’assiduité en loge. Extrait du rituel 1 er grade d’App :., Conforme au Convent des Gaules : ‘’C’est par votre assiduité aux travaux que vous parviendrez à graver dans votre âme vos devoirs comme Apprenti.’’

5 Rituel d’apprenti de la Grande Loge Générale Écossaise, 1804, extrait fourni dans La Tradition des francs-macons : Histoire et transmission initiatique, Dervy, Dominique Jardin

6 https://www.ledifice.net/B036-6.htmlhttps://www.ledifice.net/7180-8.html

7 https://www.jlturbet.net/2016/04/l-assiduite-maconnique-par-albert-lantoine.html

8 Les Trois Secrets des Francs-Macons, Jules Mérias

9 https://ipponshotokankarate-do.fr/preceptesfunakoshi

10 Transmission et pratique de l’adab soufi dans la Ḥāfiẓiyya Ḫalwatiyya, confrérie soufie de Moyenne-Égypte (XIXe-XXe siècles), Renaud Soler https://journals.openedition.org/assr/26938

11https://fr.wikipedia.org/wiki/Baraka

12 Mentionné in La transmission de l’enseignement mystique par l’écrit dans les milieux Ḫurāsāniens des iiie/ixe–ive/xe, Geneviǜe Gobillot, Les Maîtres Soufis et leurs disciples https://books.openedition.org/ifpo/3083?lang=fr

13 https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01144593/document

14 Vivre, Lire et écrire les rituels, E.M.E, Sophie Perenne, Page 17, Rites profanes et rites sacrés

15 Ibid, page 13

16 Les étranges pouvoir des rites sur le cerveau – Lionel Naccache, Claude Riveline https://www.cairn.info/revue-le-journal-de-l-ecole-de-paris-du-management-2010-4-page-7.htm

17 Vivre lire et écrire les rituels, Sophie Perenne, page 27

18 Ibid, page 29

19 L’esprit Prédictif – La théorie du cerveau Bayésien – 2022